Dossier

Météo-Immo Eté 2023 : le marché de l'immobilier commercial en France

Crédit article : Julien PIERRE & Estelle SEGURET 23/08/2023 • 4 min.
Pour la période estivale 2023, Perspectives Immobilier Entreprise vous propose une série d'articles sur la météo des marchés de l'immobilier d'entreprise en France. Après les bureaux puis les entrepôts et locaux industriels, place à notre troisième et dernier focus qui se concentre cette fois sur l'immobilier commercial.
Un contexte inflationniste chahuté qui pèse sur le commerce et les loyers

Un contexte inflationniste chahuté qui pèse sur le commerce et les loyers

S'il est bien un domaine qui n'a guère été épargné par les difficultés et les mutations à marche forcée depuis 2020 c'est bien le commerce physique.

Citons en vrac les déboires économiques de certaines enseignes (Camaïeu, Go Sport, Gap France, Kaporal, Kookaï, André, Pimkie, Burton, San Marina...), la succession d'évènements qui impactent la fréquentation des lieux de consommation (crise des gilets jaunes, crise sanitaire, émeutes urbaines de la fin Juin 2023), l'inflation et la hausse des coûts de l'énergie ou encore l'évolution des modes de consommation (succès de l'achat-vente des vêtements de seconde main sur des plateformes comme Vinted, frénésie de la fast fashion avec l'enseigne Shein qui créé systématiquement l'évènement avec ses pop-up stores ou encore - signe des temps - le discounter non alimentaire Action élu enseigne préférée des français en 2023.

De quoi sérieusement mettre à mal la trésorerie des commerçants alors que dans le même temps l'Indice des Loyers Commerciaux (qui sert de référence pour l'indexation des loyers pour les locaux commerciaux) a lui progressé de +10,7% entre le premier trimestre 2020 et le premier trimestre 2023.

Dans ce contexte pour le moins incertain, comment se porte l'immobilier commercial ? Pour tenter de répondre à cette question, nous vous proposons un état des lieux en distinguant les situations respectives des pieds d'immeubles et centres-villes, des zones commerciales de périphérie et des centres commerciaux.

Vers un retour en grâce des locaux commerciaux de centre-ville ?

Dans son étude Digest France 2023 le spécialiste Codata a passé au crible 4.000 sites commerciaux représentant plus de 300.000 emplacements à travers l'Hexagone. Il en ressort que la moyenne nationale du taux de vacance des pieds d'immeubles (incluant les boutiques de centres-villes) est de 9,11% en 2022 après avoir connu un pic à 9,94% en 2020.

Quand on regarde dans le détail le taux de vacance par région, la bonne dynamique est surtout du côté de l'ouest de la France (taux de vacance à 8,34% en Bretagne, 7,47% dans les Pays de la Loire et 7,03% en Normandie) et de Paris et l'Ile-de-France où le taux de vacance tombe à 6,82% !

Le high street retail redémarre à Paris et dans les grandes villes régionales

Dans le cas de la capitale, il y a évidemment toujours des disparités avec des locaux et des boutiques vides dans certains secteurs mais la tendance est positive, notamment sur quelques rues emblématiques au premier rang desquelles l'avenue des Champs-Elysées qui a enregistré plusieurs prises à bail marquantes (Adidas, les montres de luxe Panerai, la joaillerie Messika, les vêtements de sport Lululemon...). A Paris et dans les métropoles régionales comme Lyon, Toulouse, Bordeaux, Lille, Marseille ou Rennes, les valeurs locatives reprennent des couleurs dans plusieurs rues (après des décotes de 10% à 30% pendant le Covid) et nombreux sont les spécialistes qui voient là un retour en grâce du 'high street retail' qui se positionne sur les top emplacements n°1 en hypercentre et zones piétonnes très denses.

Autre signal positif, certaines enseignes comme Darty ou Décathlon réinvestissent les centres-villes avec des formats adaptés aux surfaces moyennes.

Il y a enfin clairement eu un effet d'opportunité pour certaines enseignes bien capitalisées qui ont profité des emplacements libres et du réajustement des loyers pour renforcer leur maillage et prendre des positions sur les meilleurs axes de la capitale et des grandes villes régionales.

Offre et vacance des locaux commerciaux dans les villes moyennes

Ce redémarrage des centres-villes à Paris et dans les métropoles régionales trouve-t-il un écho dans les villes moyennes et petites ? Entre attentisme pour les villes moyennes et inquiétudes pour les plus petites villes, la réponse est plus mitigée.

Quand on interroge Estelle SEGURET de l'agence Arthur Loyd de Blois au sujet de son marché, elle note une vacance persistante sur les grandes surfaces en centre-ville et les difficultés du prêt-à-porter se font sentir dans l'hypercentre qui concentre de nombreuses enseignes et indépendants spécialisés dans l'équipement de la personne. Des nouveaux concepts arrivent et le centre-ville bénéficie du dispositif Action Coeur de Ville pour le dynamiser mais le marché des pieds d'immeubles tourne pour le moment au ralenti, une situation qu'on retrouve dans nombre de villes moyennes.

Quand on descend encore en taille de ville pour rentrer dans le périmètre des Petites Villes de Demain, ces communes rurales de moins de 20.000 habitants soutenues par l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires pour renforcer leur attractivité commerciale, la vacance commerciale semble revêtir un caractère quasi-systémique.

Quelles solutions à la perte d'attractivité commerciale des petites villes ?

Quand Le Monde consacre un article au cas de Vaucouleurs dans la Meuse, il éclaire le cas de ces 'Petites Villes de Demain' en perte de vitesse où le centre-ville a été déserté par les habitants, où de nombreux logements demeurent vacants et où beaucoup de commerces, emportés par la crise, ont tiré le rideau sans que les bailleurs, peu concernés ou englués dans des indivisions conflictuelles, ne s'en émeuvent.

Faisons ici le lien avec le travail mené en Loir-et-Cher (41) par l'OET Observatoire Economique des Territoires qui dans sa Publication n°167 (Fiches de l'Observatoire Mai 2022) mène une analyse très fine sur 17 petites communes du département pour tenter de comprendre les causes de la vacance commerciale.

Il en ressort que la perte de vitalité commerciale est pour partie liée à la démographie, la vacance étant élevée là où le déclin démographique s'inscrit dans un temps long, mais cela n'explique pas tout. Dans sa synthèse l'OET note que la situation de chaque PVD est unique et voit sa vacance déterminée par une combinaison à chaque fois différente de facteurs tels que la fréquentation de passage, la dynamique économique et touristique, les équipements ou encore le volontarisme des municipalités et celui des commerçants.

Au-delà du mantra selon lequel le commerce va là où il y a des flux et que pour redynamiser les coeurs de villes, il faut (ré)générer des flux et convaincre la population d'y (re)venir, l'analyse de l'OET démontre que la vacance commerciale dans les petites villes est multifactorielle et appelle à des traitements différenciés.

La belle dynamique des zones commerciales de périphérie se poursuit

A l'échelle nationale le taux de vacance des locaux dans les zones commerciales de périphérie est de seulement 6,54% en 2022 (après un pic à 8,18% en 2020) et le taux d'occupation par les retailers y est de 64,01 % (contre 31,89% pour les pieds d'immeubles).

Dans les faits les parcs d'activités commerciales à ciel ouvert ont moins souffert des restrictions sanitaires et continuent de capter le flux des citadins qui habitent la campagne ou la périphérie des agglomérations.

Le commerce de périphérie continue aussi de profiter de la situation économique dégradée grâce ses loyers modérés même si le recul de l'usage de la voiture (qui freine les allers-retours vers les grandes enseignes de périphérie), la chute de la consommation alimentaire et les difficultés de certaines enseignes sont des signaux à prendre en compte.

Les centres commerciaux à la recherche d'un nouveau souffle

Dans les centres commerciaux, le taux de vacance moyen des emplacements est de 13,73% en 2022 (après être monté à 14,31% en 2021), un chiffre qui souffre de la comparaison avec les pieds d'immeubles (9,11%) et les zones commerciales (6.54%). Les retailers y occupent 71,25% des emplacements et l'équipement de la personne (habillement, chaussure, maroquinerie) y pèse pour 27% des activités présentes.

Même si les consommateurs sont revenus fréquenter leurs allées après la pandémie et que les centres commerciaux attirent encore 80% de la population (qui s'y déplace avant tout pour le large choix de marques, les prix attractifs et les aménagements soignés) ils connaissent une érosion de leur fréquentation et de leur CA depuis une dizaine d'année à cause entre autres de la concurrence d'internet, du vieillissement de leurs aménagements ou de l'évolution des façons de consommer (la phase de découverte avant achat se fait par exemple à plus de 80% sur le web pour les générations Z et Alpha).

Les centres commerciaux doivent évoluer (voir sur ce sujet le livre blanc prospectif du spécialiste du commerce Accessite) et veulent devenir des lieux hybrides mêlant consommation phygitale et expériences, loisirs, sport, culture, socialisation, services ou encore travail (coworking).

Quelles perspectives pour l'immobilier commercial ?

Le commerce physique fait preuve de résilience comme en témoignent la baisse du taux de vacance pour tous les segments de l'immobilier commercial (pieds d'immeubles, zones commerciales, centres commerciaux). Il semble même retrouver de l'attrait auprès des investisseurs comme l'illustrent ses 40% de part du marché de l'investissement en immobilier d'entreprise au premier trimestre 2023 (contre 22% pour l'année 2022) selon le conseil Cushman & Wakefield.

Comme nous venons de le voir dans cet article, ces performances encourageantes ne doivent pas masquer la disparité des situations. Si les grandes artères commerçantes de Paris et des grandes villes régionales retrouvent des couleurs, c'est aussi parce que ce sont des marchés où les valeurs locatives se sont ajustées. ce qui est loin d'être le cas partout.

Le nécessaire ajustement des valeurs locatives pour débloquer les marchés de l'immobilier commercial

Quand en guise de conclusion nous évoquons le sujet des valeurs locatives avec Estelle SEGURET de l'agence Arthur Loyd de Blois, elle confirme que dans certaines villes - de taille moyenne ou petite notamment - ledit ajustement n'a pas eu lieu . Il y a toujours des recherches et de la demande pour des boutiques ou des emplacements commerciaux mais les implantations sont gelées par la barrière des loyers qui peuvent localement être encore trop élevés, certaines enseignes ayant des ratios loyer/CA incompatibles avec les valeurs locatives pratiquées. L'ajustement des valeurs locatives fait partie des facteurs clés permettant de fluidifier le marché.

Consultez les cabinets spécialisés Arthur Loyd à Angers, Blois, Le Mans ou Rennes

Avec cet ultime chapitre de notre Météo-Immo estivale, nous concluons notre état des lieux 2023 des marchés immobiliers des bureaux, des entrepôts et locaux industriels et des locaux commerciaux.

Pour tous vos projets immobiliers professionnels à Angers, Blois-Châteauroux, Le Mans ou Rennes (recherche de locaux, offres à commercialiser, estimations, implantation, conseils....) n'hésitez pas consulter les agences Arthur Loyd qui ont contribué par leur expertise à ces articles et se tiennent à votre disposition pour vous accompagner sur ces marchés.

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